La presse automobile publie régulièrement des classements de vente des véhicules et s'il n'est pas surprenant que les constructeurs s'y intéressent, l'attrait de ces palmarès auprès du grand public est a priori étonnant.
Motivations des acheteurs de voitures
On pourrait penser que l'acheteur potentiel choisisse sa futur automobile en fonction de facteurs objectifs tels que les performances, l'habitabilité ou la qualité de la finition, ainsi qu'en fonction de facteurs subjectifs tels que la ligne ou la décoration de l'habitacle par exemple.
Tout cela entre bien sûr en jeu dans l'acte d'achat, mais il y a aussi une attirance pour les voitures les plus vendues. L'acheteur se sent rassuré en achetant la même voiture que son voisin, peut-être se sent-il ainsi mieux intégré dans la communauté des automobilistes, n'étant pas psychologue je n'irai pas plus loin dans l'énoncé des causes.
Il y a aussi des raisons pragmatiques à agir ainsi, car un véhicule répandu aura plus de chances de bien se revendre sur le marché de l'occasion. Peu importent les causes, le fait est qu'un véhicule se vend d'autant mieux qu'il est bien vendu.
Amélioration des classements automobiles
Les fabricants d'automobiles observent donc avec attention ces classements, avec tellement d'attention d'ailleurs qu'ils n'hésitent pas à intervenir pour obtenir des positions plus favorables pour leurs modèles.
Cela commence dès la conception de la gamme, des modèles n'ayant que peu de rapport entre eux pouvant partager la même appellation. Ainsi, la version monospace et la version berline peuvent avoir le même patronyme, un suffixe désignant le monospace (Xsara Picasso, Renault Scénic…). Les ventes des différentes versions pourront alors être cumulées pour obtenir un classement plus flatteur.
Mais si les astuces de nommage et les ventes naturelles ne suffisent pas à obtenir un bon classement pour un modèle de véhicule stratégique, son constructeur n'hésitera pas à agir pour améliorer sa position dans les palmarès.
Immatriculer avant de vendre
Il procédera alors à des immatriculations sur parc d'un nombre suffisant de voitures pour gagner une ou plusieurs places. Les voitures ainsi immatriculées perdent leur statut de véhicule neuf et deviennent des véhicules d'occasion n'ayant jamais quitté les parcs de leur fabricant et ayant en conséquence zéro kilomètre au compteur.
L'acheteur d'une de ces voitures fera naturellement une bonne affaire, car il acquerra une voiture techniquement neuve au prix de l'occasion. Le constructeur aura lui perdu de l'argent dans cette opération. Bien sûr, il espère que l'augmentation des ventes à venir censée en résulter lui permettra d'en compenser le coût.
Il y a quelques inconvénients pour l'acheteur cependant, son automobile ne sera pas "de première main" ce qui pourrait avoir une incidence lors de sa revente. Par ailleurs, il pourrait se voir refuser un crédit pour un véhicule neuf dont les taux sont souvent plus intéressants que ceux accordés pour une voiture d'occasion. Mais tout cela est compensé par l'économie réalisée par rapport au prix de vente inscrit au catalogue.
Cette pratique a bien entendu des limites. Si les constructeurs de deux modèles concurrents en usent simultanément, ils auront tous deux fait baisser leurs marges sans pour autant modifier la hiérarchie des ventes.